Cet article est paru chez un de mes partenaires, Finance Innovation et présente la méthodologie que je mets en place. 

Je dois faire une confession. Il y a bientôt 20 ans, je travaillais chez Vodafone UK en tant que chef de produit pour le développement et déploiement de solutions B2B. C’était l’explosion des solutions mobiles à forte valeur ajoutée. 

Dans ce rôle, j’avais beaucoup d’interactions avec les équipes de ventes. Et je ne pouvais m’empêcher de penser “On développe des solutions innovantes, ces commerciaux ont la belle vie même s’ils n’ont, au bout du bout, pas d’expertise. A t’on vraiment besoin d’eux?” Je croyais aussi au fameux “build it, they’ll come”.  

Par la suite, j’ai monté ma propre structure et donc dû me mettre à vendre. Comme beaucoup de professionnels, je n’avais pas d’expérience formelle de la vente ni, je dois l’admettre, de compréhension des dynamiques humaines au centre d’un processus de vente. Donc présentations. Demos. Propals. Des clients qui me disent “c’est intéressant”. Et puis plus rien… Là j’ai eu mal. Et j’ai compris que la vente B2B était une dynamique complexe. Frustré d’avoir une approche “show up and throw up” ou j’arrivais et je faisais des démos ou présentations suivi d’un “Qu’en pensez-vous?”, je me suis dit qu’il devait y avoir une approche plus efficace.  Après moultes formations et réflexions, j’ai compris que la vente B2B était l’une des activités les plus compliquées qui allait contre beaucoup de ce que l’on croit être des évidences. Une activité complexe et fascinante car basée de façon prédominante sur l’humain, nos biais psychologiques et nos émotions. 

En effet, l’un des nombreux problèmes de la vente B2B est que les décisions que nous prenons sont émotionnelles. Et que nous nationalisons après. Or la majorité des organisations et donc des vendeurs, ceux dont c’est le métier ou ceux pour qui vendre n’est qu’une partie parmi d’autres responsabilités (ce que j’appelle des NSP, Non Selling Professionals tels que consultants qui délivrent et vendent, Customer Success Managers ou indépendants) pensent que leurs interlocuteurs sont des gens rationnels, cartésiens. Ce n’est pas leur faute, c’est une fausse vérité que l’on nous assène depuis des siècles. Surtout en France, pays où les mathématiques, physiques et autres sciences “dures” règnent. 

Au cours de mes récentes expériences de VP Sales pour des organisations “VC backed” avant le lancement de mon activité dans laquelle j’aide les organisations telles que celles membre de Finance Innovation, j’ai eu naturellement de nombreuses occasions de voir des pitchs et autres présentations d’entreprises innovantes. Et je ne pouvais m’empêcher d’être dubitatif en voyant fondateurs et commerciaux parler de technologie, de machine learning, de AI, de data science, de Saas et autres aspects qui sont les variables que les décideurs utilisent pour rationaliser leurs décisions. Pas pour prendre leurs décisions. En effet, vous en connaissez beaucoup des dirigeants qui se lèvent le matin en se disant: “J’ai vraiment besoin d’une solution SaaS qui gèrent mes data déstructurées et d’un dashboard pour (insérer terme technique ici)”? Non? Moi non plus.

Au-delà d’une sémantique qui n’est pas alignée sur les problématiques des acheteurs, nombre de commerciaux ont avec leurs prospects des relations inégales, je dirais même plus des relations de “master – servant”. Les prospects contrôlent le processus commercial avec tout un ensemble de mécanismes multiples et trop longs à expliquer dans ce bref article. Les commerciaux de nombreuses organisations manquent cruellement d’une réelle méthodologie basée sur 5 piliers fondamentaux, les 5C, qu’ils peuvent implémenter de façon systématique et qui leur permettent d’établir un rapport d’égal à égal entre eux et le prospect tout au long du processus, une relation de conseiller de confiance. 

1- Communication: comme mentionné, nous vivons dans un pays cartésien. Nous croyons que ce qui est important ce sont les maths, la physique, les sciences. A l’école, en primaire, secondaire, à l’université, il n’y a pas de focus sur ce que les britanniques appellent “soft skills”. Or une bonne communication, condition sine qua non pour développer ce rapport d’égal à égal, ne vient pas naturellement. Il y a deux aspects importants, ce que les anglo-saxons appellent “nature and nurture”. D’un point de vue “Nature”, il est tout d’abord nécessaire de connaître notre style de communication et de décoder celui de notre interlocuteur. Pour pouvoir s’adapter à celui-ci et non lui imposer le nôtre. D’un point de vue “Nurture”, il est aussi important d’avoir une mentalité qui nous permette de nous centrer sur les besoins émotionnels de nos prospects. Le RDV prospect doit aussi être une opportunité pour que le prospect remplisse ses besoins émotionnels, et non pour le commercial de remplir les siens en parlant de son superbe produit, les nombreuses références, etc… Il y a donc un besoin de mettre notre égo de côté, ce qui n’est ni naturel, ni facile. Or combien de fois peut-on observer, dans des rendez-vous prospects, un commercial qui parle deux fois plus qu’un prospect? 

2- Curiosité : Nous sommes naturellement centrés sur nous. C’est une réalité et cela ne fait que s’empirer. En effet, de nombreuses études montrent que l’empathie est une qualité en chute libre depuis plusieurs années. S’intéresser à l’autre plutôt que d’obtenir une gratification rapide et poser les questions pour bien comprendre son contexte n’est pas naturel. Au risque de tomber dans la facilité, je pointe le doigt vers les réseaux sociaux… Et ne parlons pas de notre culture qui nous dit que “la curiosité est un vilain défaut. Quand elle est cruciale dans le rôle de commercial. Ce manque de curiosité est un énorme problème pour les dirigeants.  Combien de ceux avec lesquels je discute me partagent leurs frustrations: “Ils ne cherchent pas à comprendre leurs prospects”. Les commerciaux ont donc besoin que l’on leur fournisse une réelle stratégie de question qui va au-delà des frameworks basiques telles BANT. Les organisations et leurs dirigeants ont aussi besoin de revoir leur approche du développement professionnel de leurs équipes. En formant leurs commerciaux sur leurs produits, les bénéfices, etc.. ne transforment-ils pas, au risque d’être très direct, leur force de vente en plaquette produit?


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    3- Contrôle : Parce que nous sommes entre nous et que nous pouvons donc parler franchement, nous pouvons reconnaître que les processus de vente sont trop souvent contrôlés par les prospects. Combien de meetings finissent par des phrases du style “on doit y réfléchir” ou “Envoyez moi la présentation, il nous faut étudier ceci”. Suivi d’un prospect qui disparaît et ne répond plus aux mails. Pourtant, n’avait il pas déclaré cette présentation comme “très intéressante”? Se pourrait-il que les prospects mentent aux commerciaux qui eux disent la vérité (je sais, “shocking isn’t it”?). Savez vous en combien de temps les humains prennent une décision? Bien souvent, quand le prospect dit “on doit y réfléchir”, n’est ce pas le commercial qui réfléchit alors que, pour le prospect, c’est tout réfléchi? Prendre le contrôle d’une conversation commerciale, de façon empathique et respectueuse, n’est pas facile mais il y a des façons de faire qui permettent au commercial de développer cette relation de conseiller de confiance. Une autre dimension importante du contrôle est le besoin pour le commercial de se connaître. Pour qu’une organisation améliore ses résultats commerciaux, il est fondamental que les membres de l’équipe vente se connaissent pour pouvoir bien contrôler style de communication, émotions et se centrer sur leurs prospects. 

    4- Constance : Avant de décoller, un pilote de ligne a une check list. Un ensemble de variables qu’il vérifie de façon constante. C’est documenté et cela évolue dans le temps. Les armées ont des “war games” pour répéter le modus operandi à suivre en cas de conflit. Les sportifs qui sont au sommet de leur sport descendent sur le terrain constamment pour acquérir des automatismes lorsqu’ils sont sous pression et ont un coach qui les guide. Tout comme les pilotes de lignes, les sportifs ou armées, les commerciaux sont des “creatures of habits”. Ils ont donc eux aussi besoin pour être efficaces de documentation sur la meilleure façon de réagir à telle ou telle situation (les anglo-saxons ont ce que l’on appelle un “sales playbook”) et de répéter régulièrement pour pouvoir, sous pression, réagir correctement. 

    5- Courage : Vendre est un métier excessivement compliqué. La fonction commerciale est celle où l’on a à faire face au plus de refus. Pour gérer cette difficulté, les commerciaux, ceux dédiés à la vente tout comme les NSP dont je parlais ci-dessus, déploient une armada d’approches qui, en réalité, les dessert. Ils cherchent par exemple à développer une relation amicale avec leurs prospects plutôt que cette relation franche de conseiller de confiance. Celle où le commercial amène le prospect à se confier à lui et ou les deux parties admettent ouvertement qu’ils peuvent peut être ne rien avoir à faire ensemble. Ou ils n’ont donc pas le courage de poser des questions difficiles qui leur permettrait de vraiment comprendre le contexte du prospect. Ou ils ont du mal à prendre le téléphone de peur de se faire rejeter et trouvent tout un ensemble de raisons pour ne pas prospecter (une proposition à terminer, un CRM à remplir, une cousine dont il faut prendre des nouvelles, un café à aller prendre, etc…). Il est donc nécessaire d’équiper les commerciaux avec une approche holistique, un mélange d’habitudes, de mindset et de techniques, qui leur permet de gérer ces difficultés et de performer au mieux.

     

    Il n’y a pas de solution miracle et de “quick fix” et développer ces nouvelles habitudes prend du temps et des efforts. Les programmes de transformation que je mets en place pour aider les dirigeants sur leurs efficacité commerciales diffèrent des approches traditionnelles. Afin de permettre que ces expertises et nouvelles façon de travailler soient bien assimilées et les challenges résolus une bonne fois pour toute.